Après 8 saisons au sein du LOSC, évoluant jusqu’au poste de responsable commercial et participant activement à l’entrée du club dans le stade Pierre Mauroy, Gaspard NORMANI, 32 ans, a rejoint New York pour quelques semaines et s’intéresser au fonctionnement du sport US.
Il nous livre un billet relatant sa «Fan-Experience » au Barclays Center et au Madison Square Garden pour un match NBA, au MetLife Stadium pour de la NFL ou encore à la Red Bull Arena et au Yankee Stadium pour des rencontres de soccer (MLS).
MONEY and NAMING
La rencontre MLS commence dans un relatif anonymat, seule la moitié des 25 000 sièges ont trouvé preneurs, moins que d’habitude nous explique un stadier, prenant pour excuse la tempête qui menace New York depuis quelques jours. Peu de ferveur donc pour cette fin de saison régulière au Red Bull Stadium où s’affrontent l’ancienne équipe de Thierry Henry et Colombus Crew SC. En tant que professionnels du milieu, on s’accorde un petit tour du propriétaire qui n’intéresse généralement que les lecteurs de sportbuzzbusiness.fr : La boutique du club est toute petite, la marque de la Franchise plus que présente et si les loges ont l’air confortable, elles ne sont pas vraiment pleines, sale temps pour le responsable commercial du coin. Seul véritable différence avec l’Europe, la présence de commerciaux B to C dans les travées du stade qui essayent de fidéliser le spectateur en vendant sur place des abonnements et des package billetterie. Puisque le soccer est le sport préféré des 5 / 9 ans, le public est, sans surprise, très jeune et familial malgré un petit groupe d’Ultra local qui s’égosille de temps en temps. On est d’accord, le potentiel de la ligue semble sans égal mais si de nombreux articles fleurissent régulièrement sur le futur développement de la MLS et si le nombre de spectateurs augmente chaque saison dans le stade (21 500 spectateurs de moyenne lors de la saison régulière en 2015, les Seattle Sounders étant loin devant avec 44 000 supporters de moyenne à domicile alors que Dallas FC n’en regroupe « que » 16 000), le ballon rond peine encore à exister sur le territoire Américain où les monstres médiatiques que sont la NFL, la NBA et la MLB captent la grande majorité des audiences, des publics, des sponsors et trustent les chaines phares.
Dans tous les bars de New York, du jeudi au lundi, le Football Américain rassemble des tonnes de passionnés. Impossible pour un esprit habitué aux diffusions Européennes de suivre un match à la TV sans avoir cette étrange sensation de traverser un long tunnel cathodique de publicité, entrecoupé de quelques actions de jeu ne dépassant jamais les 5 secondes. Le Sunday Night Football sur NBC touche pourtant plus de 20 millions de personnes chaque semaine pour le match phare de la journée. Trop compliqué à regarder mais excitant à vivre et à expérimenter, notamment en se rendant au MetLife Stadium qui reçoit alternativement chaque semaine, 80 000 supporters des Jets ou des Giants. L’ambiance autour du stade rappelle le film « L’enfer du dimanche » !
Parkings à perte de vue, odeur de barbecue, hommes, femmes, enfants vêtus de tee-shirt et casquettes à l’effigie de leur équipe favorite, tout fan de sport qui se respecte rêve de vivre un jour cette ambiance particulière. De Manhattan, le train met bien 1h pour arriver vers la majestueuse enceinte qui fait briller le nom de la société d’assurances Metlife au 4 points cardinaux. Outre un Naming à faire pâlir d’envie les dirigeants des clubs de ligue 1 (facturé 200 millions de dollars sur 25 ans) Verizon (qui vient également de s’engager dans un partenariat avec la NBA), Pepsi, Sap Emc et Bud Light se partagent l’appellation des 4 entrées principales (pour 7 millions de dollars par an) dans un modèle d’intégration des sponsors, loin des contraintes imposées par les partenariats publiques-privés des stades de Lille ou de Nice. Inauguré il y a plus de 5 ans, le Metlife Stadium a été d’abord pensé pour et par les annonceurs qui peuvent communiquer comme ils l’entendent tout en participant à l’expérience client. Le tarif de la place étant équivalant au prix d’un billet d’avion entre deux capitales Européennes (140 dollars minimum pour ce match), je m’étonne auprès de mon voisin que personne n’ait pensé à mettre un toit pour au moins couvrir les spectateurs en cas de pluie !
« Ils nous ont construit la réplique exacte du stade précédent, le Giants Stadium, simplement il y a plus de places et plus de VIP, tout le monde était un peu déçu en le découvrant, j’imagine qu’ils font juste beaucoup plus d’argent » J’imagine oui …
« Je ne viens plus qu’1 à 2 fois par an, les places sont trop chers et l’abonnement coûte quelques milliers de dollars » continue-t-il de m’expliquer dans son accent du New-Jersey.
Le MetLife Stadium, ouvert maintenant depuis plus de 5 ans est un modèle de stade connecté
Pourtant les Giants ont annoncé avoir baissé les prix de leurs billets en 2015 et ce pour la 1ère fois depuis l’ouverture du stade. Grâce aux hospitalités, sponsors et différents Naming ? Certainement, la multiplication des contrats avec les annonceurs et l’augmentation des « Premium Seats » dans les nouvelles enceintes (4 entre 2010 et 2012 à New York) ont permis de rendre le « Ticketing » grand public plus accessible en compensant la baisse des revenus liés au prix du billet. Le secteur automobile est très présent dans le sport US, à titre d’exemple, TOYOTA sponsorise le « Half time » des rencontres de la NFL, pendant que KIA et HONDA se partagent le marché du « Official vehicle of » respectivement au Madison Square Garden et au Barclays Center de Brooklyn. Ce dernier a également convaincu CALVIN KLEIN de donner son nom aux loges les plus prestigieuses de sa nouvelle arène de 19 000 places. Alors qu’en France le naming du nouveau Bercy – AccorHotels Arena – suscite le débat, même la romantique patinoire de Bryan Park installée pour Noël a vendu son âme à la Bank of America … la culture du naming vous dit-on !
Roi du CATERING
Revenons aux matchs de soccer. Le match des Redbulls est désormais sur le point de commencer et Thibaut qui m’accompagne pour l’occasion sort naïvement un billet de 20 dollars pour régler les 2 bières commandées à la hâte. « Twenty-eight » nous demande-t-on dans un grand sourire… Soit le prix unitaire de notre billet ! Seul le Red Bull facturé 3 dollars la canette est abordable, normal il est produit « At Home ». Peut-être pas si bête pour nous maintenir éveillés pendant un match qui oscille entre le niveau Ligue 2 et Ligue 1 milieu de tableau. Si un mot défini le mieux les enceintes américaines, il s’agit de « Catering ». On vient au stade pour manger des chips, partager un hot-dog en famille ou boire une bière entre amis. Sushis, pizzas, burgers, l’offre est de qualité et le goût presque savoureux, on en oublierait presque qu’un sandwich et une Bud pour 24 dollars ressemble quand même à une forme de racket. Pas étonnant que la restauration dans les stades rapporte des millions de dollars par rencontre aux franchises. Avec 85 dollars de panier moyen pour un spectateur lors d’un Super Bowl, l’Europe semble toute petite et loin dernière. Que ce soit en football, basket ou en soccer, la rencontre commence toujours une quinzaine de minutes plus tard que ce qu’il est officiellement inscrit sur le billet, on les soupçonnerait presque de vous forcer à consommer …
En cette fin d’après-midi au Yankee Stadium, il y autant de monde qui se presse dans les coursives du stade que de supporters assis en tribune. Peu importe finalement car les stars européennes vieillissantes de la franchise du New York City FC qui squatte le stade mythique de l’équipe de baseball avant de trouver un accord pour leur futur New York City Stadium, n’ont pas l’air très motivées : Pirlo et Lampard s’ennuient quand Villa joue tout seul. Et puis pour les vrais fans qui veulent suivre le match, une appli téléchargée sur leur mobile leur permet de commander et de se faire livrer directement à leur place !
Au Madison Square Garden ou au Barclays Center, les stands de boissons et de restauration se dressent tous les 10 mètres, diffusant subtilement (ou pas) une odeur propice à la consommation, la queue vers le comptoir est toujours plus longue, que ce soit, ou pas, pendant les temps morts. Quand le client est satisfait, savoure et passe un bon moment, il ne squatte pas les bars et restaurants aux alentours pour économiser un peu d’argent et rentrer dans l’enceinte au dernier moment comme les supporters ont coutume de faire autour des stades en France.
EXPERIENCE
Chaque rencontre commence de la même façon, l’hymne américain est chanté « A cappella », dans une arène qui se remplit tout doucement, puis, à la manière de ce que l’on peut voir au LOSC ou au PSG, la vidéo du « game opening » est diffusée sur les écrans géants pour faire monter l’ambiance. En ce match de pré-saison NBA, le Barclays Center se remplit petit à petit, 19 000 personnes sont attendues pour soutenir l’ex franchise des Nets du New Jersey, devenu en 2012 les Nets de Brooklyn et portés par l’ambition du nouveau propriétaire Russe d’être champion dans les 5 ans. « On est mieux assis ici que dans ton salon … » me fait remarquer Thibaut. Je ne peux pas lui donner tort, le confort est incroyable et l’accueil par le personnel plus qu’à la hauteur. Plus tôt dans la journée, un email m’avait été envoyé avec toutes les informations nécessaires à ma venue : métro, parking, accès, solution de restauration sur place … bien entendu combiné à une offre billetterie pour les prochaines rencontres.
Sans vouloir toujours parler d’argent, au vu du prix du billet, pas question de rater une minute du match et arriver à nos places en retard… Nos amis américains sont dans une autre logique, au coup d’envoi de New York Knicks / Cleveland, les tribunes du Madison Square Garden sont quasiment vides et les coursives pleines. Pourtant, ce soir, le Madison reçoit « The big guy », celui que tout le monde veut voir, Lebron James. La franchise locale est proche de créer l’exploit, étant toujours au coude-à-coude dans le money-time. L’ambiance restera pourtant lounge, cosy à l’image de la salle mythique, elle aussi incroyable de confort. « On se croirait au ciné par moment … » me chuchote Thibaut. Ou à l’Emirates pour un match d’Arsenal ? Peut-être que pour la fureur d’un bon match de football Européen, il vaut mieux attendre les play-offs ou se rendre à une rencontre universitaire.
Les quarts temps s’enchainent, tout comme les fameux « Celebrity row » qui nous apprennent que Spike Lee ou encore la tenniswoman Caroline Wozniacki sont dans la salle. Les spectateurs s’excitent plus devant la « dance cam’ » qui filme les tribunes, que devant les points de Carmelo Antony puis deviennent carrément hystériques au moment des fameux lancés de tee-shirts. Les animations Kia, les pom pom girls, les chanteurs de Gospel, les danseurs acrobatiques rythment chaque temps morts. Incroyable que les joueurs puissent encore se concentrer quand 50 personnes envahissent le parquet toutes les 6 minutes… Peu importe, le sportif n’est pas la priorité, ce qui importe, c’est le Show et l’Entertainment auxquels on s’accommode, finalement avec plaisir, passant juste un bon moment.
Pour notre expérience au Yankee Stadium, les 25 000 personnes présentes ce soir ont presque toutes revêtues la tunique bleue ciel identique à celle de Manchester city ou un des fameux Tee-shirts « no Pirlo no party » qui s’arrachent pour 45 dollars à chaque corner merchandising. Cette sensation de communauté autour de la franchise pourtant très récente, participe à l’ambiance générale bon-enfant. Les coursives sont ouvertes, et tout le monde y circule librement pour rejoindre sa place en tribune, s’arrêtant au « guest relation desk » si un problème ou un besoin survient.
Au milieu de ce bleu ciel, quelques maillots de l’équipe adverse parsèment les tribunes, comme au MetLife Stadium quelques jours plutôt où les 49ers de San Francisco se mélangeaient avec les Giants locaux. Pas de tensions, peu de rivalité sportive, on est là pour se défouler, encourager son équipe et partager un moment avec les enfants dans un confort jamais égalé en Europe. Modèle de stade connecté, le Wifi du MetLife Stadium est plus fort, malgré la foule, que la fibre de n’importe quel opérateur et vous permet de partager vos émotions via twitter qui s’affichent en live sur les écrans géants ou vous connecter au réseau pour vérifier votre route du retour.
Au Madison Square Garden, c’est l’heure du money-time et pour la première fois de la soirée, les spectateurs s’intéressent au score. Debout, impliqués, ils encourageront pendant les 3 dernières minutes leur équipe favorite qui mènent de 2 points avant que Lebron James, déjà auteur de 31 points ne prenne les choses en main pour venir battre l’équipe locale … Un peu de ferveur et d’intérêt sportif ne font jamais de mal !
Même ambiance chez les Giants, où Manning trouve son receveur lors des 5 dernières secondes pour un touchdown qui leur offrent la victoire et fait exploser le stade. Mon voisin me prend dans ces bras en me soufflant à la figure son haleine aviné et hurlant sa joie. On est rassuré, en plus de s’amuser, les spectateurs américains s’enquièrent quand même un peu du résultat ! Et comme on n’attend pas le dernier match de la saison pour le show, le feu d’artifice démarre du haut des tribunes en raccompagnant chacun chez soi.
Madison Square Garden : Date d’ouverture : 11 février 1968 / Capacité : Basket-ball: 19 033 (New York Knicks) / Hockey: 15 006 (Rangers de New York)
Yankee Stadium : Capacité: 49 642 / Date d’ouverture : 16 avril 2009 / Équipes : Yankees (baseball) New York City (soccer)
MetLife Stadium : Capacité : 82 566 / Date d’ouverture : 10 avril 2010 / Équipes : Giants de New York, Jets de New York (football US)
Barclays Center : Date d’ouverture : 21 sptembre 2012 / Capacité : Basket-ball: 17 732 (Nets de Brooklyn) / Hockey: 15 795 (Islanders de New York) / Concert: 19,000
Red Bull Arena : Capacité : 25 189 / Date d’ouverture : 20 mars 2010 / Équipe : New York Arena (soccer)
Laisser un commentaire