Des premières vidéos gaming sur FIFA dans sa chambre, à la création du Vinsky Football Group, le célèbre créateur de contenu sportif, Vinsky, a façonné sa carrière brique après brique. Ce dernier revient pour Sport Buzz Business sur une évolution qui ne doit rien au hasard.
Sport Buzz Business : Revenons sur la genèse de l’aventure Vinsky s’il vous plaît.
Vinsky : Je m’appelle Vincent Maduro et j’ai 34 ans. Cela fait très longtemps que je suis Internet. Je dis Internet car la réalité des réseaux sociaux, il y a 13 ans, n’est pas la même qu’aujourd’hui. Durant mon cursus d’ingénieur à Troyes, où je suis sorti diplômé, j’ai commencé à faire des vidéos. À l’époque, YouTube était très lié au gaming et ce type de contenu restait de niche, avec des compétences informatiques un peu nouvelles. J’ai donc commencé à coder un site Web pour créer une communauté de fans autour de FIFA, et cela en m’appuyant sur YouTube. La deuxième étape a été le lancement de contenus de football en live, sur lesquels j’ai été pionnier sur la zone francophone. Je me suis beaucoup inspiré du modèle britannique en avance sur son temps, mais en y ajoutant une touche personnelle avec mes challenges. De fil en aiguille, j’ai franchi une troisième étape en lançant le Vinsky FC Magnanville en 2017, un club amateur partant de zéro dont le but était de gravir les étapes, step by step. J’ai toujours été inspiré par le Groupe Red Bull et son modèle économique et structurel innovant et impactant. Plus le projet Vinsky FC avançait et plus une idée germait dans mon esprit. A savoir, créer un groupe de clubs internationaux en partant toujours d’une feuille blanche.

« Durer sur Internet est très difficile »
SBB : Comment dure-t-on dans l’univers de la création de contenu ?
Vinsky : Durer sur Internet est très difficile. Selon moi, une ascension en ligne est un travail de longue haleine, gradué, chronologique et façonné à la manière d’un architecte. Personnellement, cette évolution s’est déroulée naturellement. J’ai toujours eu cette fibre entrepreneuriale en moi et mon cursus en ingénierie m’a offert ce pragmatisme et cette appréhension « un peu caméléon » des problématiques et des projets. Résultat, je ne grille aucune étape et ne me lance jamais au hasard vers une nouvelle opportunité.
SBB : Comment lance-t-on un club de zéro ?
Vinsky : Lancer un club de zéro a été extrêmement compliqué, même avec mon aura grandissante. Si créer une association loi de 1901 est à la portée de n’importe qui, les obstacles administratifs demeurent nombreux. Disposer d’un terrain le dimanche à 15 heures, heure à laquelle les équipes amateurs séniors jouent traditionnellement en France, est par exemple loin d’être une sinécure. Cela débouche irrémédiablement sur un effet d’entonnoir. Concrètement, il faut soit gagner la confiance d’une mairie, soit tenter une fusion avec un autre club. Et par la suite, si les résultats suivent sur le terrain et que l’équipe gravit des échelons, la Fédération Française de Football (FFF) demandera automatiquement que le club créé des sections et bénéficie d’un stade plus adapté. Aujourd’hui, le Vinsky FC Magnanville, c’est donc 230 licenciés et les sections qui vont avec.
« Mon métier s’arrêtera quand je n’aurais plus d’histoires à raconter. »
SBB : Pourquoi le Vinsky FC Magnanville s’exprime-t-il au-delà des résultats ?
Vinsky : Outre l’obligation de résultats à court et moyen termes, l’objectif du projet Vinsky FC Magnanville a toujours été de raconter une histoire. Nous sommes passés de la Division 6 à la Division 3 Senior (ndlr : avec une année blanche au milieu à cause du Covid). L’année 2024 fut d’ailleurs la première où nous avons stagné en D3 car le niveau en région parisienne est très élevé et vecteur d’un excellent vivier de talents. Néanmoins, cette saison nous sommes bien placés pour la montée avec des joueurs talentueux et une vraie identité de groupe. Le Vinsky FC, c’est aussi un tremplin. Nos éléments ne sont pas payés mais ils peuvent rêver encore plus grand. Certains ont par exemple signés en R2. Pour être transparent, dans la globalité nos joueurs restent attachés au projet et veulent rester pour le faire grandir.
Voir cette publication sur Instagram
SBB : Quid du sponsoring ?
Vinsky : Adidas est un peu notre sponsor historique en soutenant le Vinsky FC Magnanville, depuis le début. Depuis 2017, nous avons également bénéficié du soutien d’Unibet, de Winamax ou encore d’EDF et noué des partenariats avec des applications comme Sport Easy. Aujourd’hui, l’actualité sponsor du club, c’est surtout Adidas Europe et 11teamsports, e-shop spécialisé dans le football.
Objectif Coupe d’Europe !
SBB : Avec l’acquisition de l’Inter Montréal et du Sporting Club Escaldes, ce projet Red Bull 4.0 franchit un cap.
Vinsky : A l’Inter Montréal, il y a de vraies similitudes avec le Vinsky FC Magnanville. Le club a été créé par des Français quasiment la même année, et joue à un niveau légèrement inférieur. Cette opportunité s’est imposée naturellement puisque j’ai choisi de poursuivre ma carrière au Canada. Parallèlement, j’aimerais que cette acquisition (en 2022) permette à des joueurs de venir étudier au Québec et de goûter à une nouvelle culture. Le but est de les intégrer socialement via le club qui les aidera dans leurs démarches. Nous voulons vraiment créer des synergies qui aillent au-delà du ballon rond. Concernant le Sporting Club Escaldes, actuellement en deuxième division andorrane, l’opportunité est née d’une rencontre avec un directeur sportif qui a expérience et un réseau solide localement. Au sein de pays plus modestes comme Andorre, Gibraltar ou Malte, les fédérations sont beaucoup plus facilement accessibles et les sommes à injecter plus modestes. Mais ces championnats – mêlant monde amateur et monde professionnel – présentent surtout un avantage surpassant tous les autres : bénéficier d’une véritable opportunité de joueur l’Europe ! Toutefois, il ne faut pas être trop gourmand, trop vite car c’est tout un écosystème à appréhender sur le plan culturel, administratif, économique et juridique. Ce projet rime donc avec temps long et nous nous appuierons pour l’instant sur une base de joueurs locaux et expérimentés. Cela serait trop dangereux de nous éparpiller. Enfin, lorsque vous évoquez ce projet Red Bull 4.0, il est important de préciser que cette structuration de groupe créé, de facto, des passerelles pour nos joueurs. Rejoindre un club professionnel andorran et jouer à terme une Coupe d’Europe est un rêve. Un jour, un joueur de Magnanville ou de Montréal signera à Andorre et jouera l’Europe.
Voir cette publication sur Instagram
« Si un jour on se qualifie pour un match de tour préliminaire européen, je verserai sûrement une petite larme ».
SBB : Quelles compétences spécifiques as-tu développées grâce à ce métier ?
Vinsky : Durant ma formation d’ingénieur, j’avais déjà opté pour de nombreuses options orientées entrepreneuriat. Deuxièmement, j’ai toujours été passionné par le management et la gestion, j’ai donc beaucoup appris en autodidacte à travers mes différentes expériences. J’ai également surfé sur mon ADN de porteur de projets et ma capacité à fédérer. Je m’épanouis dans la réussite collective et en aidant les gens à vivre leur passion. Et surtout, je ne me fixe pas de limite, tout en gardant les pieds sur Terre. Si un jour on se qualifie pour un tour préliminaire européen, je me remémorerai toutes ces heures de travail et ce parcours qui a débuté dans ma chambre, avec sûrement une petite larme (rires).
SBB : À quoi ressemble ta journée type ?
Vinsky : Il n’y a pas de secret, réussir dans un tel projet, c’est aussi savoir bien s’entourer. Le Vinsky FC Group s’articule autour d’un organigramme et d’un fonctionnement très solides, avec Jérôme Phojo – un ancien joueur pro en ligue 1 et Ligue 2, apparu à six reprises sur le jeu vidéo FIFA, qui a rejoint Magnanville en Départementale 3 pour encadrer l’équipe – et Romain Puteaux, directeur sportif France et accessoirement coach de Magnanville. Avec le décalage horaire (6 heures de moins à Montréal), je suis très connecté avec la France et Andorre dès le matin. L’après-midi, je suis davantage focus sur l’écosystème canadien. Nous sommes encore en phase de lancement du projet Groupe, mon rythme est donc extrêmement soutenu. Pour les plus jeunes, je voudrais insister sur un point très important : entre le monde de Football Manager (FM pour les intimes) et la réalité, il y a quand même un gouffre, et cette réalité ne doit jamais être éludée.
SBB : Vas-tu continuer les challenges ?
Vinsky : Les challenges continueront, c’est certain, mais mon fil conducteur aujourd’hui reste le Groupe. Je vais également lancer un concours qui permettra à un spectateur de la chaîne de rejoindre le Sporting Club Escaldes.

SBB : Comptes-tu lancer une compétition qui verra s’affronter les trois clubs du Groupe ?
Vinsky : On ne s’interdit rien, une telle compétition présente des atouts indéniables.
“Le temps long est le meilleur des conseillers et il ne faut surtout pas avoir peur de se lancer”.
SBB : Selon toi, quelle est la prochaine grande tendance dans la création de contenu sportif ?
Vinsky : Les challenges footballistiques ont encore de beaux jours devant eux avec les nouveaux formats proposés par TikTok ou Instagram. Le narratif aussi est indémodable. Les récits de pros ou de semi pros intéressent beaucoup les gens. Une aventure sans histoire sonne un peu creuse. Tout le monde veut gagner dans le sport, mais ça ne suffit pas. Il y a un état d’esprit, une aura à développer, tout comme l’impact RSE. Aujourd’hui, à Magnanville, nous faisons par exemple de l’aide aux devoirs. Le club, c’est aussi un vecteur d’intégration et de développement social.
SBB : Quel(s) conseil(s) donnerais-tu à quelqu’un qui voudrait se lancer dans la création de contenu sportif ?
Vinsky : Je citerais une citation de Mr Beast : « Spoiler alerte, vos premières vidéos ne feront aucune vue ». Il faut donc vraiment travailler son concept, y croire totalement, et surtout, beaucoup travailler. Il ne faut pas avoir de regrets. Même si c’est très cliché, on n’a qu’une seule vie. Toutefois, il y a une gestion en bon père de famille à respecter et des paliers à honorer. Ma carrière a beaucoup évolué en 13 ans. Tous mes choix ont été calculés et mesurés en fonction des « pour » et des « contre » avec toujours en fil conducteur cet ADN d’architecte issu de ma formation d’ingénieur. Il y a 13 ans, je jouais à FIFA, aujourd’hui je lance un Groupe. Je le répète, le temps long est le meilleur des conseillers et il ne faut surtout pas avoir peur de se lancer.