Hier, l’Autorité Nationale des Jeux (ANJ) réunissait les opérateurs de paris sportifs pour faire le bilan de l’UEFA Euro 2020 et notamment des dernières campagnes publicitaires dont certaines ont été vivement critiquées et pointées du doigt ces dernières semaines.
« A l’issue d’un échange constructif, ces derniers se sont accordés sur la nécessité de procéder à un rééquilibrage de leurs pratiques afin de préserver le modèle récréatif du marché français des jeux d’argent. A ce titre, l’ANJ a présenté un plan d’action qui vise à renforcer la conformité des opérateurs, à adapter et compléter les outils existants et, le cas échéant, à recourir à des procédures de sanction » précise le communiqué de l’ANJ.
Selon une enquête Harris Interactive menée du 6 au 8 juillet pour l’ANJ, plus de la moitié des personnes ayant vu les publicités pour les paris sportifs estiment qu’elles sont trop nombreuses et près de huit français sur dix ayant vu ces publicités considèrent qu’elles peuvent comporter un risque d’addiction. Un Euro 2020 qui a généré un total de 434 millions d’euros chez les opérateurs de paris sportifs en ligne.
Depuis quelques années, le betting est positionné par de nombreux opérateurs comme un bon moyen de gagner de l’argent simplement et rapidement, occultant les risques financiers et d’addiction. De plus, les investissements publicitaires ont été conséquents ces dernières semaines sur un marché ultra concurrentiel. Pour se démarquer de la concurrence, travailler leur image et leur préférence de marque, les principaux opérateurs font appel à des agences de communication dont le travail consiste notamment à positionner le betting comme un acte cool et lifestyle du quotidien. Comme pour les principaux secteurs d’activités, la publicité ne vante pas le produit en lui-même mais bien une image et un mode de vie.
Récemment, c’est le spot publicitaire de Winamax « Tout pour la Daronne » qui a suscité une vague de critiques, notamment sur les réseaux sociaux. « Il n’est pas possible de faire croire aux jeunes que l’on peut gagner facilement de l’argent en pariant ! Consciente des risques que la situation actuelle fait peser sur la protection des joueurs, elle veut y répondre de façon résolue et efficace avec un plan d’action qui se traduira rapidement par la clarification des règles applicables, la proposition éventuelle de nouveaux outils d’intervention et des actions de contrôle ou de sanction renforcées » précise Isabelle Falque-Pierrotin, Présidente de l’ANJ, dans un communiqué.
https://www.youtube.com/watch?v=fvwapIv1Q-Y&ab_channel=Winamax
Ma « daronne » ne m’a jamais dit de ramener de l’argent sale, en faisant des choses aux antipodes de l’éducation qu’elle m’a donné.
Elle m’a appris à étudier et à travailler (même avant les diplômes) pour que chaque € gagné soit à la sueur de mon front, dignement.#PasDesPigeons https://t.co/U1l4BkQsxh
— Marwan Muhammad (@_MarwanMuhammad) June 11, 2021
A la suite de la réunion du 20 juillet, l’ANJ adresse deux messages au marché :
– Une ligne jaune a été franchie en termes de pression publicitaire lors de cette compétition, de nature à questionner le modèle de régulation mis en place depuis 10 ans ; il importe de réduire drastiquement et immédiatement la pression publicitaire en faveur des paris sportifs ;
– Les communications commerciales qui procèdent au ciblage des jeunes adultes et entretiennent l’illusion de l’argent facile sont particulièrement problématiques.
« A l’issue des échanges qui se sont déroulés dans un climat constructif, les opérateurs de jeux ont indiqué partager collectivement les préoccupations exprimées par le régulateur et se tenir prêts à travailler à ses côtés pour proposer des axes d’amélioration et de limitation de ces communications commerciales » écrit l’ANJ.
A relire : Dépendance, endettement, isolement… l’enfer du décor des paris sportifs chez les jeunes
L’ANJ met en place un plan d’action afin que l’offre de jeux demeure récréative et mesurée
Compte tenu de l’objectif partagé entre le régulateur et les opérateurs de redressement des pratiques, l’ANJ a annoncé le lancement de 5 chantiers pour combattre les dérives observées et à clarifier, voire à compléter, le cadre légal. Ces chantiers devront être terminés d’ici la fin de l’année.
En matière de publicité :
• L’ANJ a demandé aux opérateurs un bilan à mi-parcours de la mise en œuvre de leurs stratégies promotionnelles telles qu’approuvées par le collège de l’ANJ en janvier 2021 et se réserve, après examen de ces bilans, la possibilité d’engager des procédures de sanction en cas de non-conformité ;
• L’ANJ lancera une consultation des parties prenantes à la rentrée sur le thème de la publicité. Cela lui permettra ensuite d’adresser des recommandations aux acteurs et, le cas échéant, de proposer de nouveaux outils d’intervention ;
• Une collaboration est engagée avec l’ARPP pour décliner les restrictions règlementaires en recommandations concrètes pour les opérateurs. L’objectif étant d’émettre d’ici la fin de l’année des lignes directrices précises et opérationnelles sur la publicité.
En matière de gratifications commerciales (offres de bonus de recrutement et de fidélisation) :
• L’objectif est d’analyser en détail les pratiques du marché français mais aussi celles qui sont en vigueur dans les autres pays européens. Cette étude permettra de définir les conditions de gratifications « raisonnables », conformément au cadre de référence, et d’évaluer l’opportunité de renforcer l’encadrement ou la limitation de ces offres.
En matière d’identification et d’accompagnement des joueurs excessifs :
• Le 21 septembre prochain, l’ANJ organisera un séminaire réunissant plusieurs experts scientifiques de l’addiction aux jeux d’argent et de hasard afin de s’accorder sur une définition commune et robuste du jeu excessif ou pathologique qui servira de référentiel à l’ensemble des acteurs. L’ANJ a constaté en effet que cette définition varie fortement d’un opérateur à l’autre, ce qui tend à fragiliser la protection des joueurs ;
• Des contrôles sont en cours à la suite de plaintes reçues de la part de joueurs problématiques qui n’auraient pas été détectés par les opérateurs et qui auraient été encouragés à continuer à jouer via l’octroi de gratifications commerciales.
En matière de limitations des mises :
De nombreux joueurs se plaignent régulièrement, notamment auprès du médiateur, que les opérateurs limitent leurs mises.
• A la suite de la décision du Conseil d’Etat du 24 mars qui reconnait que le joueur est un consommateur, l’ANJ a entamé une revue approfondie des conditions générales d’utilisation proposées par les opérateurs au prisme du code de la consommation ;
• Une délibération, actualisant la recommandation de l’ARJEL de 2017 et encadrant plus strictement les limitations de mises sera proposée aux membres du collège de l’ANJ en septembre ;
• Une fois cette règle posée, l’ANJ pourra décider de mener des actions de contrôle qui pourraient conduire à sanctionner, le cas échéant, les opérateurs ne respectant pas celle-ci.
En matière de tipsters :
Comme annoncé avant le début de l’Euro, l’ANJ a saisi les autorités administratives et judiciaires compétentes des pratiques commerciales trompeuses de certains sites de pronostiqueurs ou tipsters qui se sont récemment fortement développés.
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