Réussir sa reconversion, son après-carrière, n’est pas une chose aisée pour les sportifs de haut niveau. Pour la plupart, rien n’est acquis et beaucoup se retrouvent dans la galère. SportBuzzBusiness.fr a interrogé Lionel Potillon, ancien joueur de football, qui a évolué à l’ASSE, au PSG, à la Real Sociedad et à Sochaux. L’ancien défenseur aborde sa reconversion et nous livre quelques-unes de ses expériences dans le football professionnel.
SportBuzzBusiness.fr : Après une carrière sportive réussie, tu as tourné la page de footballeur professionnel en 2007. Tu as suivi une formation en Marketing du Sport à l’Université de Rouen. Peux tu nous raconter ta démarche ?
Lionel Potillon : Tout au long de ma carrière, «l’après» à été pour moi une préoccupation. J’ai donc réfléchi très tôt aux perspectives qui pourraient s’offrir à moi. Dans un premier temps et au début de ma carrière, j’ai un peu accumulé les formations qui se présentaient à moi : BTS Action commerciale, BEES 1° degré puis BEES 2° degré, Diplôme d’attaché de presse et de chargé de communication, diplôme d’assurance de niveau 3. C’était pour moi une façon d’occuper mon temps libre et d’assouvir mon désir de connaissance. Puis sur la fin de ma carrière j’ai affiné en fonction de mes aspirations futures, c’est pourquoi j’ai passé mon DEF (diplôme d’entraineur de Football) et que j’ai intégré tout de suite après l’arrêt de ma carrière le Master 2 de Rouen en Marketing et Management du Sport Professionnel.
SBB : Aujourd’hui tu travailles pour l’Association ASSE Coeur-Vert. Peux tu nous parler de ton travail au quotidien et du rôle de cette association ?
LP : Il s’agit d’une association d’intérêt général que nous avons crée de toute pièce. J’ai travaillé presque 6 mois sur le dossier pour aboutir à une structure juridique idoine avec une gouvernance, qui à terme, ne puisse pas fragiliser le club. j’ai donc aujourd’hui le rôle de directeur de cette association. Mon rôle est très vaste et consiste à mettre en œuvre ou à soutenir des actions citoyennes, sociales ou caritatives; des associations de personnes malades ou de personnes handicapées; la promotion du sport amateur et encourager la valorisation du développement durable et la protection de l’environnement. L’objectif et de fédérer les principaux sponsors du club autour de ces projets afin de décupler les moyens mis à disposition par le club de l’ASSE.
SBB : Est-ce que tu es attiré par la fonction d’entraineur ?
LP : Oui et non… Oui pour l’aspect management au quotidien et la recherche permanente de l’amélioration du groupe, de la valorisation du potentiel de chaque joueur. Non pour la pression exacerbée qui découle de chaque mauvais résultat, la rapidité avec laquelle on remet souvent en cause le travail de l’entraineur, à tort ou à raison. C’est d’ailleurs pourquoi je me sens plus aujourd’hui une âme de formateur que d’entraineur.
SBB : Où te vois-tu dans 10 ans ?
LP : 10 ans c’est très long dans le football… Je ne sais pas ou je serais mais je sais par contre ce que je souhaite : responsable du centre de formation.
SBB : En tant qu’ancien footballeur professionnel, comment analyses-tu le métier d’agent de joueurs ? Comment a-t-il évolué ?
LP : Quand j’étais joueur, une boutade circulait dans le monde du foot : « tout agent honnête n’a pas de travail !! » Personnellement, j’ai eu la chance d’en connaitre qu’un seul (une société de trois associés), j’en étais pleinement satisfait et comme je pense être fidèle en amitié, cela a duré plus de 15 ans. Nous nous côtoyons d’ailleurs encore régulièrement. Mon choix s’est fait très tôt lorsque j’ai eu une grave blessure au genou. Ce sont les seuls qui ont continué à me téléphoner, c’était pour moi une marque de respect mutuel. En ce qui concerne les agents d’aujourd’hui, je n’ai pas d’a priori négatif. Je pense que la mise en place d’une licence à vocation à donner plus de transparence à ce métier. Le rôle du bon agent va bien au-delà de la simple renégociation de contrat. Il doit être à la fois celui qui rassure, qui vous décharge de certaines taches administratives et être celui qui vous remet les pieds sur terre si besoin. Sa connaissance du foot est par contre à mes yeux essentiel. Hors il me semble que parfois viennent se greffer des personnes qui n’ont pas forcement ces compétences et à terme c’est toujours au détriment du joueur.
SBB : Quel regard portes-tu sur le foot business ? As-tu un avis sur l’arrivée de QSI dans ton ancien club le PSG ?
LP : Cela ne me pose aucun problème. Si ils viennent au foot, c’est qu’ils y perçoivent un intérêt. L’argent fait partie intégrante du football, il est nécessaire pour lutter avec les grosses cylindrées européennes. Ce qui peut en revanche poser problème, c’est l’hégémonie d’un club sur une compétition et sur une longue durée surtout si les investissements (achats de joueurs) réalisés ne le sont pas en France. A terme, il semble de moins en moins utopique d’imaginer un championnat sur le modèle américain surtout si les contraintes demandées par l’UEFA sont jugées inadaptées et difficiles à mettre en place pour les gros d’Europe.
SBB : Que retiens-tu de ton expérience en Espagne, où tu as évolué à la Real Sociedad en 2003-2004 ?
LP : Ce fut pour moi une formidable expérience. La champions league tous les week-end en quelque sorte. C’est un championnat où la qualité et le plaisir du jeu sont essentiels. De plus, être sous les ordres d’un entraineur comme Raynald Denoueix vous marque. Si aujourd’hui, parmi la vingtaine d’entraineurs que j’ai connu durant ma carrière je devais n’en citer qu’un, ce serait lui sans aucune hésitation. Après, la découverte d’un nouveau championnat dans la carrière d’un joueur est une chance, la culture du foot, l’approche de l’entrainement et des matchs, les rapports aux médias, au staff, aux anciens, tout est différent. C’est une expérience qui vous renforce, qui vous apprend à être plus autonome et plus ouvert aux autres.
SBB : Quel est le joueur qui t’a le plus impressionné ?
LP : Sans aucune contestation possible Ronaldinho. Il est capable de faire des choses avec une balle de tennis que j’étais incapable de faire sans ballon sous peine de me faire une entorse du genou !!
SBB : Quel est ton regard sur le sport et le dopage ? Est-ce l’omertà, notamment dans le football ?
LP : Je ne crois pas que ce soit l’Omerta, il y a certainement des abus comme dans tous les sports, mais j’ai le sentiment que la surmédiatisation du football protège en quelque sorte de ce fléau. Les moindres fait et gestes des footballeurs sont analysés, disséqués. Je ne vois donc pas comment ils pourraient passer au travers des mailles des journalistes s’ils étaient dopés. Cette remarque est encore plus vraie à l’étranger où la presse est plus présente et plus véhémente, où chaque club a quasiment son quotidien pro et son quotidien contre. Le duel Barça/Real est ainsi relayé par un duel As/Marca.
SBB : Beaucoup de footballeurs avouent ne pas suivre les matchs et le football en général. La passion du ballon a-t-elle disparu chez les nouvelles générations ?
LP : Je pense en effet que les motivations premières ont un peu évolué, même s’il ne faut pas généraliser. Aujourd’hui certain parents mettent leur enfants en centre de formation avec l’espoir qu’il gagne un jour beaucoup d’argent. L’aspect scolaire passe au second plan, hors très peu parviendront à signer un contrat professionnel.
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