L’absence du sport dans la campagne présidentielle, symbolique d’un décalage entre politiques et Français

Grine Lahreche, ancien pensionnaire de première division française de handball (Tremblay-en-France) et avocat au Barreau de Paris en droit du sport et fusions-acquisitions, nous livre une tribune libre sur sur la place du sport dans la campagne présidentielle. Un article qui n’engage que son auteur. Nous attendons vos nombreuses réactions !

 

A moins d’un mois du premier tour de l’élection présidentielle, force est de constater que ces sujets chers aux Français comme le sport, sont aux abonnés absents de cette campagne 2012. Il ne reste en effet plus grand-chose de la démonstration élyséenne triomphante de 2007, présentant le nouveau Président en jogger émérite, à vélo ou montant d’un pas alerte les marches de l’Elysée. Alors que Nicolas Sarkozy avait promis de faire passer le budget des sports à 3% de celui de l’état, celui-ci représente aujourd’hui 0,15% du budget, un plus bas historique. Pire, la fonction de Ministre des Sports est complètement dévalorisée après ce quinquennat et installer un débat crédible et durable sur la place du sport dans la société française apparaît aujourd’hui comme mission impossible.

Le sport : un mot tabou dans le programme des candidats

Mais les autres candidats ne sont pas non plus exempts de tout reproche. Rien sur le sport dans le programme de François Bayrou. Peu de choses dans celui de Marine Le Pen. Quelques propositions de François Hollande (création de postes supplémentaires de professeurs de sport, réorganisation du Ministère des Sports, organisation d’un « Grenelle » du sport français, augmentation du budget du CNDS et augmentation de la taxe Buffet relative aux droits de diffusion des évènements sportifs). Jean-Luc Mélenchon a bien quelques idées aussi (augmentation du nombre de professeurs de sport, mise en place de crédits supplémentaires alloués au Ministère des Sports) mais dans l’ensemble la place occupée par le sport dans les programmes des principaux candidats paraît anecdotique. Eva Joly déclarait même en février 2012 : « Si je fais 2-3%, on va me donner le Ministère de la Jeunesse et des Sports, et ça s’arrêtera là ». C’est dire le peu de crédit donné à la question sportive par les candidats.

 

Une telle négligence pose question.

L’oubli du sport dans cette campagne présidentielle est symbolique du décalage entre le discours politique et la vie quotidienne des Français, qui accordent une place importante au sport dans leur vie. : 89% des français de plus de 15 ans déclarent pratiquer une activité sportive régulière. On dénombre par aussi 118 fédérations sportives en France, lesquelles rassemblent 170.000 clubs mobilisant plus d’un million de bénévoles.

Le sport est lui aussi touché par les tumultes économiques et sociaux de la société

Le sport n’est pas épargné par les mêmes problèmes qui touche le pays à l’heure actuelle : instauration des règles dites de « fair-play » financier destinées à préserver la santé financière des clubs et l’équité des compétitions sportives à l’horizon 2015, développement des règles éthiques et préservation des valeurs du mouvement sportif (notamment respect des règles du jeu et de l’arbitre, lutte contre la violence, l’exclusion ou la xénophobie). Reflet de notre société, le sport est aussi frappé par la mondialisation : « forum shopping » des jeunes talents sportifs traités comme du bétail, délocalisation des évènements sportifs vers des pays économiquement plus attractifs…

A l’instar de la récente loi du 1er février 2012[2], le gouvernement a cependant tenté d’apporter des réponses pratiques (dispositif de lutte contre le dopage, incrimination du délit d’initiés en matière de paris sportifs ou encore alignement du droit des sociétés sportives sur le droit commun) sans pour autant voter une grande loi-cadre qui aurait permis d’esquisser les contours d’une véritable politique sportive.

Le besoin d’une politique sportive forte pour renforcer le rayonnement et l’impact de la France sur le plan international

Aujourd’hui, l’enjeu est simple. Si le sport continue à être absent de la campagne présidentielle 2012, il ne faudra pas s’étonner que les Français continuent de désintéresser d’une campagne qui se dispute sur un terrain loin de leurs préoccupations quotidiennes. Définir une politique sportive ambitieuse constitue ainsi un enjeu international à part entière : il s’agit tout à la fois d’un élément de rapprochement entre le pays réel et les candidats tout autant qu’un des éléments du rayonnement de la France en Europe et dans le Monde. L’Espagne, pourtant dans une situation difficile, s’est achetée une image à l’international grâce à ses fantastiques résultats sportifs depuis cinq ans, qui n’est le fruit d’une politique sportive ambitieuse lancée à l’occasion des Jeux Olympiques de Barcelone…en 1992 ! Il est donc temps d’agir.

Pour le sport en France, les enjeux de demain s’articulent autour de trois priorités : tout d’abord, favoriser la pratique sportive dans notre système éducatif (refonte et redécoupage des emplois du temps des enfants dès leur plus jeune âge, augmentation des bourses d’études donnant accès aux universités et aux grandes écoles). Ensuite, améliorer la qualité et le nombre d’infrastructures pour les sports de salle (handball, basket, volley) de plus de 10.000 places afin de s’aligner sur nos voisins européens (ces infrastructures devant être multifonctionnelles et considérées comme un outil d’aménagement du territoire). Enfin, renforcer la présence et l’influence de la France au sein d’organisations sportives internationales (FIFA, UEFA, Comité Olympique) afin d’exporter notre « modèle sportif français ».

Les enjeux sont nombreux, la tâche est difficile mais le challenge en vaut la peine. Messieurs les candidats, à vous de jouer.

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